« Je n’étais plus moi-même, j’ai fait une connerie, j’ai honte » : la confession de Jérôme Bosviel face à son combat contre l’addiction

L’ouvreur de Montauban a révélé son addiction aux jeux d’argent et les dérives qui l’ont poussé à mettre en danger sa relation avec ses coéquipiers. Dans les colonnes de la Dépêche, Jérôme Bosviel a livré un témoignage troublant de vérité, qui met en lumière un sujet encore tabou dans le sport professionnel.

Jérôme Bosviel se livre sans tabou sur son addiction aux jeux d’argent (© Rugbyrama)

« Je ne jouais plus pour gagner, je jouais pour me rattraper »

Les suiveurs du rugby vous diront qu’ils savent qui est Jérôme Bosviel . Sur le terrain, il incarne la régularité et la rigueur du buteur expérimenté, ponctué par des drops de génie, qui ont mis son équipe sur des rails solides. En dehors, à l’écart des regards, il était prisonnier d’une spirale destructrice, enfermé dans un schéma qui s’empirait au fil du temps.

Le joueur raconte sans détour cette mécanique infernale : « Je suis tombé dans les jeux, le poker et le PMU. Je l’ai caché à tous mes proches. J’avais un sentiment de honte. Je suis l’ainé de la fratrie, je suis père de famille, je ne voulais pas en parler. » Il exprime également le fait que même s’il ne le faisait pas au rugby, cela restait son exutoire en dehors du club : « Quand je venais au rugby, je ne pensais pas à ça. Mais une fois en dehors, je m’enfermais là-dedans. »

Jusqu’au moment où il commence à prendre conscience qu’il va franchir une limite. « Quand j’ai senti que je perdais le contrôle, j’ai réduit mes plafonds bancaires », explique-t-il. Il y investit toute une partie de ses économies. Et finalement, il flanche et retire de l’argent du compte de l’amicale des joueurs. Alors qu’il visait à financer les moments de convivialité, lui le débitera plusieurs fois pour financer les jeux. « Je notais tout ce que je prenais sur un carnet, pour ensuite pouvoir renflouer le compte. Je vous jure que je voulais tout rembourser, au centime près. »

Une vérité qui éclate et scinde le groupe

Les joueurs ont fini par se rendre compte de ces virements. Lors de la reprise et de la réunion du groupe, il a tout avoué : « Sur le moment, ça met forcément un coup. Mais c’était nécessaire. Certains m’en ont voulu et m’en veulent encore. Je suis conscient que je les ai déçus. » Il s’exprime sans filtre et admet ses faiblesses devant tout le groupe. Pas seulement pour qu’ils le pardonnent, mais aussi peut-être un peu pour qu’ils comprennent son geste.

L’US Montauban, bien que non impliquée dans l’amicale des joueurs a « supervisé les discussions pour préserver la vie de groupe mais également pour ne pas détruire la vie d’un homme et de sa famille. » À la suite de cette réunion, un tournant est pris par le joueur : il clôture ses comptes de jeux.

Un aveu courageux, qui ouvre la porte à d’autres ?

C’est une confession pour le moins inattendue, mais qui a provoqué une petite onde de choc dans le milieu du rugby. Mais aussi, une forme de soulagement : celui de voir un joueur briser un silence pesant et assumer sa faute, aux yeux du grand public.

Provale, syndicat qui accompagne les joueurs de rugby, a tenu à lui apporter son soutien, notamment via l’intermédiaire de son président.

« Ce qui est beau de la part de Jérôme, c’est qu’il a ouvert la porte au silence. Mais aussi à assumer qui on est, et à montrer que quand on est en difficulté, on a le droit de le dire. », a déclaré Malik Hamadache, président de Provale, à Actu Rugby. « Avoir la force de dire médiatiquement qu’on a une addiction et qu’on est coupable, c’est quelque chose de puissant. »

Et cet aveu, peut-être qu’il aidera la prévention : « Parfois, quand tu es dans le rugby depuis ton plus jeune âge, tu ne fais plus forcément attention à la prévention. Je crois que c’est le cas de Jérôme. Tu ne fais plus totalement attention quand le danger te guette ou demeure juste à côté. » Plus loin dans l’échange, Malik Hamadache continue : « Je salue vraiment Jérôme et j’espère que d’autres joueurs se rapprocheront de Provale. Nous sommes une oreille pour les joueurs, et jamais nous ne trahirons le secret médical. L’objectif, c’est de protéger le joueur. C’est notre devoir. »

Une confession honnête et qui, de la part d’un joueur reconnu, fera probablement bouger les choses. Au delà de son propre cas personnel, il faut espérer que le courage avec lequel il a avoué sa vulnérabilité au grand public poussera d’autres joueurs en difficulté à ne pas se laisser enfermer par leurs démons.

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